Trois jours de visite au Bénin (18-20 novembre 2011) pour le Pape Benoît XVI sans aborder les vraies questions : voici quelques exemples pris au hasard : silence de l’Eglise sur les élections frauduleuses, abus des prêtres sur les fidèles, le rôle bénéfique du préservatif sur la santé de la population africaine, etc. Si les deux précédentes visites de Jean Paul II en 1982 et 1993 n’avaient pas fait débats, celle de Benoît XVI s’inscrit dans la ligne droite de son approche moralisante au Cameroun et en Angola en 2009.
Qu’il choisisse l’abstinence au leu du préservatif masculin, soit ! Il est dans son rôle d’ecclésiastique. Là où le débat commence, c’est lorsqu’il tend à influencer la politique en promouvant le rôle des Eglises d’Afrique dans les activités de « réconciliation, de la justice et de la paix ». En réalité, il donne l’impression de soutenir indirectement les contre-vérités des urnes en Afrique et choisit de les légitimer en tentant un consensus hasardeux sur la « démocratie apaisée », grâce à des hommes d’église. Mais c’est nier le rôle effectif de la justice. C’est oublier que ce rôle doit aussi aller à des tenants de l’Islam ou des religions et des Traditions africaines.
C’est transférer le pardon des péchés, que Dieu seul peut accorder, aux Archevêques. Certains d’entre eux doivent désormais rêver d’accéder à de nouvelles fonctions politiques en devenant, sans vote, les Présidents de « Commission Vérité, Justice, Réconciliation et paix ». Il suffit de voir ce qui se passe au Togo voisin pour s’apercevoir qu’un tel système de réconciliation basée sur la contre-vérité des urnes a à sa tête un prélat non élu, recevant l’essentiel de ses instructions du Vatican, donc de Benoît XVI. Confondre le confessionnal et la pénitence virtuelle avec la nécessaire prise de conscience d’une démocratie représentative et participative qui permet de faire émerger la vérité des urnes est tellement lourd de sens qu’une question mérite d’être posée : pour qui travaille le Pape ? Pour Dieu d’abord bien sûr ! Mais qui est en priorité seconde ?
L’interventionnisme, sollicité ou non-sollicité des hommes d’église, dans la politique africaine empêche l’ouverture de toute information judiciaire des autorités au pouvoir. Cela neutralise et bloque complètement la possibilité de traduire en justice les présumés coupables, quand ce ne sont pas des vrais innocents identifiés comme de « bons coupables ».
Alors l’Eglise sous la direction du Pape, complice ? Peut-être pas ! Irresponsable, peut-être ! Condescendante, certainement ! Il faut en finir avec le complexe très africain du « chef blanc », ce d’autant plus que la négrophobie de la Bible doit être débattue surtout si l’on compare l’indifférence que le Pape suscite en Allemagne à la ferveur des Béninois. Alors la foi dans tout ceci ? Un peu mise de côté. Le Pape a préféré sermonner à nouveau dans les généralités la « corruption des Africains et des peuples du Monde ». Il aurait pu sermonner les corrupteurs du Monde qui viennent en Afrique, parfois cachés dans les transactions de paix, certains pouvant venir du Vatican.
L’hypocrisie n’est plus de rigueur même si le Pape est bien conscient de la situation explosive potentielle si la vérité des urnes n’est pas rétablie rapidement. Benoît XVI a donc affirmé que : « Chaque peuple veut comprendre les choix politiques et économiques qui sont faits en son nom. Il saisit la manipulation, et sa revanche est parfois violente »…
Au cours de ce 22e voyage du Pape, ce dernier a choisi de ne plus voir les jeunes qui risquaient de lui rappeler qu’ils sont au chômage et que les nombreuses prières effectuées depuis leur plus tendre enfance n’ont pas fait disparaître le jeu pervers de la Françafrique que le Pape ne condamne que dans des termes généraux. Le Pape a préféré rencontrer les enfants, moins critiques à son égard.
150 ans (18 avril 1861) après l’évangélisation des premiers convertis du Vaudou au Christianisme, le Pape tente de s’intégrer dans la nouvelle dynamique du vivre-ensemble des Béninois qui ont réussi à trouver le bon équilibre entre les différentes confessions religieuses, mais aussi entre les différentes ethnies. C’est cela l’harmonie. C’est peut-être cela la leçon à retenir du voyage au Bénin de Benoît XVI qui valide le projet pastoral du futur devenu l’Exhortation apostolique, projet élaboré en 2009 lors du 2e synode spécial des évêques pour l’Afrique. Le rôle des Eglises d’Afrique est de se mettre « au service de la réconciliation, de la justice et de la paix ».
Rien de tout ceci n’est soutenable ni durable si cela ne repose pas sur la vérité des urnes. Alors, il faut revoir les frontières de la séparation des pouvoirs entre l’Eglise et le Pouvoir politique en Afrique, ce d’autant plus que l’Eglise catholique a comme marque de fabrique d’endormir les peuples africains, plutôt que de leur faire prendre conscience des injustices criardes, avec certains en complicité avec des Prêtres catholiques mariés à des femmes ayant pignon sur rue avec une ribambelle d’enfants. Alors, il faudra que chacun nettoie devant sa porte. Car si l’habit ne fait pas le moine, il n’empêche qu’en Afrique on continue de reconnaître le moine à son habit. Malheureusement, il n’y a toujours pas de femme prêtre, encore moins d’archevêque dans l’église apostolique et catholique. YEA.
Abdoulaye Bah says
Je ne suis pas d’accord avec toi, Yves. Je n’aime pas ce Pape, je le trouve trop froid. Je suis membre du Parti radical italien qui est parmi ceux qui dénoncent le plus les excès de l’église en Italie. Nous menons une campagne actuellement pour que le Vatican paie l’impôt pour ses activités de type commercial. Nous avons organisé des manifestations contre les prêtres pédophiles. Je te dis tout ceci pour que tu sois convaincu que je ne délire pas.
Mais j’ai l’impression que tu n’as pas lu ce dernier message du Pape.
Parlant de la réconciliation il y est dit: “Pour devenir effective, cette réconciliation devra être accompagnée par un acte courageux et honnête : la recherche des responsables de ces conflits, de ceux qui ont commandité les crimes et qui se livrent à toutes sortes de trafics, et la détermination de leur responsabilité. Les victimes ont droit à la vérité et à la justice. Il est important actuellement et pour l’avenir de purifier la mémoire de construire une société meilleure où de telles tragédies ne se répètent plus.”
Et pour ce qui est du respect des verdicts électoraux et de l’impunité des voleurs:
“Le non respect de la Constitution nationale, de la loi ou du verdict des urnes, là où les élections ont été libres, équitables et transparentes, manifesterait une défaillance grave dans la gouvernance et signifierait un manque de compétence dans la gestion de la chose publique.”
Quant au comportement des prêtres, on peut y lire:
’Pour que votre message soit crédible, faites que vos diocèses deviennent des modèles quant au comportement des personnes, à la transparence et la bonne gestion financière. Ne craignez pas d’avoir recours à l’expertise des audits comptables pour donner l’exemple aussi bien aux fidèles qu’à la société.
Pour ce qui est du VIH/SIDA, il n’est pas revenu de manière explicite sur l’usage du préservatif, mais il s’était déjà prononcé l’hiver dernier en admettant son usage. Cette fois-ci il s’est contenté de dire que cela relevait de la science. Il est difficile que l’on puisse obtenir plus que ça de la part d’un pape.