Questions sur l’actualité du 27 décembre 2011
Pourquoi la directrice du Fonds monétaire international choisit-elle deux pays pétroliers pour sa première visite en Afrique ? C’est entre le 19 et 22 décembre 2011 que Christine Lagarde a visité l’Afrique. Le Nigéria d’abord avec le Président Goodluck Jonathan et la ministre de l’Économie Ngozi Okonjo-Iwaela, une ex-Directrice de la Banque mondiale. Ensuite, elle s’est arrêtée au Niger pour rencontrer le Président Mahamadou Issoufou qui sortira son premier baril de pétrole en 2012. Le pétrole attire le FMI.
Faire que le pétrole soit géré de manière à ce qu’il bénéficie à l’ensemble de la population demeure un défi. Mais le vrai message est indirect.
Elle a demandé à l’Afrique d’être résiliente comme lors de la crise 2007/2008 en soutenant la croissance mondiale alors que toutes les économies occidentales étaient dans le rouge et récession. Le problème cette fois-ci est différent.
Avec un Nigeria qui se positionne comme le premier pays producteur de brut en Afrique avec 2,4 millions de barils par jour, et un FMI en train de chercher des ressources pour imposer son plan d’ajustement structurel aux pays européens en difficulté comme la Grèce, l’Italie, le Portugal, l’Espagne et d’autres sans exclure la France, il fallait brosser dans le sens du poil l’égo des 2 dirigeants africains (Nigéria et Niger).
Un programme économique nigérian donnant la priorité à l’agriculture, la transformation et la maîtrise des capacités productives va de pair avec une certaine volonté gouvernementale d’enrayer la corruption et l’image qui colle au Nigéria sur ce sujet. Mais Christine Lagarde est allée chercher de l’argent car le FMI ne peut soutenir la dette européenne sans un apport substantiel des Etats membres disposant d’une capacité d’influence économique. La meilleure façon de convaincre est de rappeler que la crise européenne va « durer » longtemps. Le FMI ne pourra pas financer les crises budgétaires africaines.
Il est donc demandé aux Africains qui disposent d’une marge de manœuvre économique et budgétaire de constituer des réserves pour eux-mêmes, mais aussi pour les autres pays africains. C’est tellement grave, comme le répète aussi DSK, Dominique Strauss Kahn, l’ex-DG du FMI, l’acteur devenu commentateur de la crise européenne en Chine, que Christine Lagarde a mis le pied dans le plat : « Soyez conscients des nuages qui s’accumulent dans le ciel européen. Soyez sûrs d’avoir assez de réserves, de résistance pour surmonter la tempête. Comme vous l’avez fait pendant la crise en 2008 et 2009.
Pour le FMI la crise européenne aura trois conséquences fâcheuses sur l’économie africaine : « 1. une contagion dans le secteur bancaire ; 2. une baisse des exportations et 3. une réduction dans l’investissement direct à l’étranger ». Pour les pays francophones ayant en commun l’usage du Franc CFA, la contagion peut signifier une dévaluation à terme. Une baisse de la demande des pays riches et un repli des investisseurs occidentaux hors de l’Afrique pourraient ouvrir la porte aux pays émergents.
C’est donc en filigrane une chance pour l’Afrique des responsables conscients. Une opportunité pour remplacer par des acteurs économiques des pays émergents, ceux des pays riches, qui investissaient en Afrique pour mieux rapatrier tout ou plus de leur investissement sans d’ailleurs créer nécessairement des emplois décents. Mais Christine Lagarde s’est bien gardée de suggérer à l’Afrique de mettre au moins 100 milliards de côté pour créer le Fonds monétaire africain dès janvier 2012. Alors, le FMI n’est qu’un partenaire du développement qui écoute mais décide sans les Africains. YEA.
Ecouter la “Question sur l’actualité du Jour” sur Africa N°1 dans l’émission “La Grande Matinale” d’Eugénie DIECKY du lundi au vendredi à 6h33, 7h33 et 8h33.
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