Questions sur l’actualité du 25 Janvier 2012
Au 1er février 2012, les chefs d’Etat africains auront peut-être un « nouveau » Président de la Commission de l’Union africaine : soit le candidat sortant, Jean Ping, Gabonais de 68 ans, soit Mme Nkosazana Dlamini-Zuma, Sud-africaine de 62 ans.
Tous deux sont des anciens ministres. Est-ce le retour de l’éternelle guerre entre francophones et anglophones ? S’agit-il des prémisses d’une scission profonde en Afrique : Afrique australe et est contre Afrique centrale et ouest, l’Afrique du nord jouant un rôle non sollicité d’arbitre ? Peut-être !
De nombreux dirigeants africains ne souhaitent plus voir des pays occidentaux diriger par télécommande l’Union africaine, même si aucune preuve n’est encore apportée alors que plus des ¾ du budget opérationnel de l’Union africaine proviennent de l’Union européenne, et 75 % du fonctionnement de 5 pays africains (Afrique du Sud, Algérie, Egypte, Libye et Nigéria).
En réalité, il y a deux nouveautés dans cette bataille pour le poste : 1. Il y a pour la première fois une femme qui présente de bonnes chances de l’emporter et bénéficie de soutiens non négligeables ; 2. Il y a une sorte d’entorse à la sacro-sainte loi non-écrite consistant à renouveler de manière quasiment tacite un candidat en exercice au motif que « tout le monde fait un deuxième mandat » à moins d’avoir un problème avec une grande majorité de pays africains.
Avec sa candidate, l’Afrique du sud cherche-t-elle simplement à introduire un peu de démocratie dans la sélection d’un candidat pour l’Union africaine ? S’agit-il d’une sanction contre la gestion et gouvernance du Président sortant, Jean Ping ?
Après tout, c’est sous lui qu’il y a eu deux guerres d’intervention sur le sol africain où le sang a coulé alors qu’il s’agissait de trouver des solutions pacifiques à des alternances politiques en Afrique. Est-ce que depuis la mort de son mentor, le feu Président Omar Bongo Ondimba, Jean Ping ne dispose plus de l’appui d’un « poids lourd africain » et apparaît de plus en plus comme un candidat d’une puissance étrangère ?
Toutes ces interrogations circulent mais sont dénuées de preuves. Il ne faut donc pas s’étonner quand Jean Ping monte au créneau et considère le principe de la compétition comme une « trahison ». Pourquoi, sans qu’il n’ait véritablement été informé, l’Afrique du sud à qui il a aurait fait allégeance, présente une candidate de poids contre lui lors du prochain sommet l’Union africaine fin janvier 2012 ?
Personne ne reproche rien à Jean Ping. Pourtant, il n’y a pas eu d’unanimité ou de majorité qualifiée d’office sur son nom à huis clos. Toutefois, ce serait une injustice pour ce monsieur doté d’une intégrité que d’autres n’ont pas eu de ne pas reconnaître que sa diplomatie de l’ombre n’a pas donné de résultats probants. Au contraire, cela a donné l’impression aux observateurs avisés que l’UA était devenue une « boîte noire », pardon une boîte africaine, où la transparence et la démocratie peinent à émerger.
Certains s’interrogent sur le soutien mou de l’actuel Président du Gabon, Ali Bongo Ondimba. Jean Ping bénéficie toutefois du soutien affiché du Président du Nigéria, Goodluck Jonathan qui le voit bien faire un second mandat. En filigrane, il faut un candidat qui puisse prendre en compte les positions du Nigéria même si cela doit aller contre une démocratie interne. Mais le fond du problème est simple : Qui peut apporter suffisamment de fonds pour rendre une autonomie de gestion à l’Union africaine ?
Qui peut oser répondre publiquement aux pays occidentaux, ce mettant en valeurs les approches afrocentriques et surtout l’intérêt des populations africaines ? Bref, la question de fond est bien de savoir si l’Union africaine, qui a perdu au passage le O pour organisation, ne construit que l’Union des chefs d’Etat, ce que d’aucuns qualifient de « syndicats de chefs d’Etats africains », ce aux dépens de la construction de l’Unité des Africains ?
Car si on fait le bilan, l’OUA et l’UA n’ont pas fait l’unité des Africains. Peut-être qu’il faut changer le nom de cette organisation pour OIA, Organisation de l’interdépendance africaine ou alors carrément parler d’UA pour Unité des Africains et non Union africaine. Au moins les chefs d’Etat africains n’organiseront plus leurs syndicats avec l’argent des contribuables africains et celui des bailleurs de fonds internationaux. Il n’est donc pas question de mettre K. O. quelqu’un mais de trouver un OK sur une base consensuelle et démocratique.
Une révolution pour les nombreux autocrates africains qui souhaitent en douce le statu quo et le conservatisme ambiant. YEA.
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