Questions sur l’actualité du 9 Février 2012
Anglophone contre francophone ? Progressiste contre conservateur ? Pragmatique contre bureaucrate ? Oui, enfin une petite démocratie fonctionne à l’Union africaine.
A force de ne rien anticiper, les dirigeants africains démontrent encore une fois que le consensus basé sur le plus petit dénominateur commun ne fonctionne plus du tout.
Les pays formant la « minorité de blocage » refusent de tomber dans le ralentissement proposé par le principe du consensus mou. A force d’être mous et de croire que la démocratie de dessous les tables donne des résultats, les dirigeants africains se trompent. C’est donc bien la division pour le 18e sommet de l’UA.
Comme d’habitude, impossible de trouver une solution, alors les dirigeants repoussent tout à la prochaine fois. Un imbroglio qui caractérise les décisions collectives des chefs d’Etats. La majorité des 2/3 permet de ne plus être dirigé par des individus qui ne recueillent plus l’assentiment de plus de 66 % des dirigeants africains. Gérer les affaires courantes pendant 6 mois fait de Jean Ping une personnalité affaiblie au plan politique, en fait au plan économique car tout le monde est au courant qu’il n’y a pas d’argent dans les caisses.
Les Etats africains n’honorent pas leur engagement envers l’institution panafricaine que certains pays ex-colonisateurs s’empressent de remplir dans le cadre d’une approche régionale. L’impossibilité d’élire un Président de la Commission de l’Union africaine (CUA) revient à constater que la candidate sud-africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, la ministre de l’intérieur et l’ex-femme du Président Jacob Zuma, a réussi sa mission. Elle n’a pas été choisie et a dû s’éclipser. Mais le non-report de ses voix et soutiens n’est pas un simple problème de lutte d’influence. Il s’agit de constater qu’il y a deux Afriques.
Alors pourquoi Mme Dlamini-Zuma a dansé lorsque Jean Ping a perdu ? Peut-être que le bilan de jean Ping venait en fait d’être sanctionné. Alors la vraie question est la suivante : faut-il danser pour marquer le mauvais bilan d’un dirigeant africain ? Question très sérieuse car si on avait dansé en Côte d’ivoire ou en Libye, si on avait accepté que les dirigeants de ces deux pays puissent rester au pouvoir pendant 6 mois afin de refaire les élections, peut-être que les solutions de sortie de crise électorale en Afrique seraient pacifiques.
En réalité, 6 mois pour prendre une décision d’alternance au sommet de l’Union africaine témoigne du manque d’agilité des dirigeants africains pris collectivement. Les longs débats sur fonds de brouilles profondes rappellent les palabres africains non intelligents. Il faut donc en tirer la conséquence suivante. En cas de crise électorale en Afrique, la minorité peut danser et demander le report de 6 mois pour retrouver une vérité des urnes et une majorité confortable de 60 %.
Quelle que soit la critique, il n’y a pas eu une attaque armée et des morts contre un dirigeant africain comme ce fut le cas en Côte d’Ivoire ou en Libye. Cette résolution pacifique d’une crise électorale passe par une période intérimaire. Dans le cas de Jean Ping, personne ne comprend pourquoi les chefs d’Etat veulent garder les mêmes pour 6 mois ce d’autant que le Président-adjoint de la Commission de l’UA, le Kenya Erastus Mwencha, est aussi en fin de mandat.
Pourquoi alors faire dans l’hypocrisie car en fait la majorité des dirigeants ont opté pour le statu quo et ont refusé le bilan sincère de l’action de Jean Ping. Au fond, les chefs d’Etats africains n’aiment l’Union africaine que s’ils réussissent à limiter l’autorité de ceux qui la dirige, refusant de déléguer une parcelle de leur pouvoir au niveau panafricain. Mais en réalité, ces chefs d’Etats pensent collectivement en termes de blocage du mécanisme décisionnel comme une part de leur identité propre, comme un enfant de 3 ou 4 ans. Quelle sincérité quand les Chefs d’Etats optent pour une prolongation d’une présidence de la CUA vidée de sa substance !
Au-delà des divisions, on assiste bien à une renaissance démocratique au sein de l’UA. Aussi, la démocratie du passage en force par un 2e mandat automatique n’a pas réussi à Jean Ping. La victoire de la minorité de blocage conduit à anticiper l’élection du mois de juillet 2012. Selon Mme Dlamini-Zuma, la vraie victoire africaine est que le principe de « l’ancien colonisateur est plus fort que le tien » ne marche plus. Les Chefs d’Etat doivent s’exposer et prendre des positions autonomes et non celles des ex-puissances coloniales. L’idéal serait qu’il y ait de nouveaux candidats en juillet 2012. Donc, ni Ping, ni Dlamini-Zuma ? YEA.
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