Questions sur l’actualité du 7 Mai 2012
La structure supranationale régionale de l’Afrique de l’Ouest, la Communauté économique et développement des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a été huée au Mali. Manifestement, le choix stratégique et la méthode utilisée par la CEDEAO n’ont pas été appréciés par ceux des militaires maliens qui ont fait le coup d’Etat du 22 mars 2012 et ont pris le contrôle de la moitié du Mali dans le cadre du Conseil national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat de droit (CNRDRE).
Un semblant d’accord avait été trouvé par le biais d’un accord-cadre CNRDRE-CEDEAO avec l’accord des militaires putschistes. Les dirigeants de la CEDEAO sous la direction d’Alassane Ouattara décident unilatéralement de promouvoir d’autres propositions sans y associer les « militaires ».
Mépris des militaires, injonctions occidentales, confusion entre les formes de gestion en Côte d’ivoire ou Burkina-Faso et la gestion au Mali telle que les putschistes la conçoivent. Avec la condamnation de Charles Taylor alors que les liens passés de ce dernier avec l’actuelle présidente du Libéria, Me Sirleaf Johnson, avec les services d’espionnage américain et avec certains chefs d’Etats de la région sont restés des « non-dits » dans les plaidoiries de la Cour pénale internationale (CPI), et le fait que certains politiques en Afrique comme en Occident commençaient à parler de capturer le capitaine Sanogo pour le transférer à la CPI, l’annonce unilatérale de la CEDEAO d’envoyer des soldats de la CEDEAO au Mali a sonné comme un piège.
Au lieu d’annoncer clairement une feuille de route pour tenter de mettre fin à l’annexion surprise des « nationalistes touaregs de l’Azawad » et des « groupes islamiques pas toujours unis entre eux », l’arrivée d’une force de la CEDEAO a sonné comme une opération pour « attraper » le Capitaine Sanogo et le renvoyer manu militari à la CPI. Il est évident que la CEDEAO ne pouvait pas entamer une « concertation » avec la junte militaire à ce sujet. Il n’est donc pas étonnant que le capitaine Sanogo, au nom de la junte, ait précisé que « La CEDEAO a pris de façon unilatérale des décisions qui ne nous engagent pas ». Il y a donc eu violation de l’accord-Cadre du 6 avril 2012 signé par lui et le médiateur de la CEDEAO, Djibrill Basolé du Burkina Faso.
Le Capitaine Sanogo dit vouloir prendre ses responsabilités, cela signifierait donc une reprise en main du pouvoir. Mais il y a eu des coups de feu dans Bamako le 30 avril 2012.
Fixer la durée du mandat du Président intérimaire Dioncounda Traoré, l’ex-président de l’Assemblée nationale, à 40 jours au lieu et place des 12 mois fixés unilatéralement par la CEDEAO, est une marque d’autorité et de méfiance envers la CEDEAO et ceux qui tirent les ficelles en sous-mains.
Le Capitaine Sanogo dit vouloir prendre ses responsabilités, cela signifierait donc une reprise en main du pouvoir. Sans une demande du gouvernement malien, il n’y aura pas de militaires étrangers au Mali. Alors la communauté internationale et la CEDEAO n’ont d’autres issues que 1. De renouveler les interventions militaires faites en Côte d’ivoire ou de la Libye avec ou sans la CEDEAO, 2. De laisser faire en se rangeant sur les forces islamiques ou de l’Azawad ou de renégocier pour que les forces militaires soient transformées en soldats d’observation comme en Syrie avec Kofi Annan ou alors 3. Offrir des « agents humanitaires » pour prendre en charge partiellement la crise alimentaire qui secoue le Mali.
En réalité, le Capitaine Sanogo, véritable décideur en dernier ressort au Mali, a aussi violé l’accord-cadre car le Premier ministre de transition, Cheick Modibo Diarra, et son équipe n’ont pas été désignés de manière «consensuelle ». Le gouvernement dit «d’union nationale » n’est pas composé de «personnalités consensuelles » excluant d’ailleurs l’avis d’une grande partie de la société civile malienne. A vouloir vendre la peau de l’ours avant de l’avoir attrapé, la CEDEAO, sous la direction d’un dirigeant francophone, expose ses faiblesses et son alignement et sa dépendance de pays non-Africains qui continuent à gérer le bourbier malien comme s’il s’agissait d’une colonie. Alors entre la CEDEAO et la junte militaire malienne, c’est le « je t’aime, moi-non-plus qui l’emporte ».
En vérité c’est le retour d’un rapport de force direct entre des militaires nationalistes au sud comme au nord du Mali et mal évalué par l’Occident et la CEDEAO et l’Union économique et monétaire d’Afrique de l’Ouest (UEMOA) que dirige celui qui est à la tête du Togo, Faure Gnassingbé, lequel reste très silencieux pour éviter des contagions. YEA
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