Questions sur l’actualité du 22 Mai 2012
Les dirigeants africains sérieux et soucieux du mieux-être de leurs populations devraient suspendre la vente des terres africaines dès lors qu’il n’y a aucune garantie que cette vente, ou cession à long-terme de l’espace africain, profite aux populations africaines.
Dès lors qu’un projet de développement notamment dans le domaine agricole, minier ou industriel, a de grandes chances de contribuer à la détérioration de l’autonomie alimentaire, et à fortiori, à la neutralisation des initiatives en faveur de la sécurité alimentaire et l’exclusion ou marginalisation des populations africaines dans ses objectifs, il y a menace pour le futur des Africains.
La plupart des contrats font l’objet d’une omerta et d’un manque de transparence qui n’honorent ni les responsables africains, ni les grandes entreprises privées ou publiques. Celles-ci ont des visées nationalistes pour leur propre pays d’origine. C’est ainsi que la société Saudi Star, avec comme PDG Mr Mohammed Al-Amoudi, un saoudien d’origine éthiopienne, a loué 10 000 hectares au sud-ouest de l’Ethiopie (région de Gambela) pour y développer une rizicole. Le problème est que l’objectif quasi-exclusif du riz produit ne sera ni pour le marché éthiopien, ni pour les Ethiopiens, mais exclusivement pour le marché saoudien. Se sentant exclue, une partie importante et mécontente de la population éthiopienne commence à gronder.
Cela a réveillé des haines multiformes ce d’autant qu’une partie des travailleurs travaillant dans les champs ne sont pas éthiopiens mais pakistanais. Fin avril 2012, un groupe armé non identifié a tué 5 personnes qui seraient liées à cette exploitation rizicole. La dure réalité est que d’autres espaces de ce pays sont mis en concession, soit à des étrangers, soit à des entreprises manifestement très proches du pouvoir. Lorsque certaines organisations de la société civile locale ou internationale s’aventurent à enquêter sur le phénomène, ils ou elles sont réduits au silence au sens premier du terme, c’est-à-dire qu’ils ou elles sont assassinés. Ce phénomène n’est pas le propre des pays africains. Au Cambodge par exemple, il est difficile d’améliorer la transparence lors de la cession des terres, de savoir ce qui se passe réellement alors qu’une grande partie de la population est pauvre et reste terrorisée par une mafia active.
Le Gouvernement cambodgien a pris des mesures contrairement aux homologues africains. Le 7 mai, le Premier ministre cambodgien Hun Sen a officiellement et temporairement suspendu l’attribution de concessions économiques afin « d’assurer l’équité et de renforcement de l’efficacité » dans la gestion et les objectifs assignés aux terres loués ou cédés à des investisseurs, qu’ils soient étrangers ou locaux. Rien de tel dans la plupart des pays africains, quand ce n’est pas le contraire. Pourtant des directives existent et ont été mises à jour en mai 2012 par le Comité de la Sécurité alimentaire mondiale de la FAO, l’agence d’exécution des Nations Unies spécialisée dans les solutions aux problèmes de l’agriculture et de l’alimentation. Le principe est simple : la FAO constate que la faim, les problèmes de sécurité et d’indépendance alimentaires et plus largement la vulnérabilité et pauvreté des populations qui découlent de l’absence d’autosuffisance alimentaire, auraient une corrélation directe avec les « droits fonciers inadaptés et non sécurisés » dans les pays en développement, l’Afrique en particulier. Après des interminables discussions quadripartites entre les Etats, les organisations internationales, les entreprises du secteur privé et les organisations non gouvernementales, la FAO propose une Directive portant sur « les principes et les pratiques souhaitables en matière de gouvernance foncière et d’accès à la terre ». La FAO a pour ambition de faire de cette Directive un document de référence sauf qu’elle n’a pas force de loi car elle ne peut être mise en œuvre que sur une base volontaire. Pour de nombreux dirigeants africains, la vente du sol africain est considérée comme un sport national et un moyen d’enrichissement rapide pour le pouvoir et les amis des pouvoirs locaux comme internationaux. Appliquer cette directive de la FAO et surtout sanctionner ceux qui ne respecteront pas les clauses édictées pose problème. 20 millions d’hectares depuis l’an 2000 auraient fait l’objet de méga-transactions de terres agricoles ou minières, pour la plupart dans l’opacité la plus complète. Mais la FAO devrait revoir sa copie car les droits coutumiers et les droits d’usage ont été systématiquement exclus…
Alors la FAO totalement neutre ? YEA.
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