Questions sur l’actualité du 31 Mai 2012
Trois des sociétés du Groupe Bolloré (Société financière /SocFin en Sierra Leone et au Cambodge et Socapalm au Cameroun) ont acquis par concession d’importantes terres arables en 2008. Mais les conditions de cessions restent obscures et l’impact sur l’environnement et les populations demeurent un véritable problème dont se soucient peu les gouvernements qui ont attribué ces contrats dans la plus grande opacité.
Les populations locales ont décidé de résister en organisant un « blocus » de la plantation en octobre 2011 sans succès puisque plus de 40 villageois-ayant manifesté ont été arrêtés sans que le gouvernement ne se soucie de leurs droits ancestraux et légitimes.
Mais les griefs étaient très précis et sont au nombre de cinq : 1. absence de consultation sérieuse des autochtones, 2. manque de transparence en général et un grand silence sur les conditions de réinstallation ; 3. mauvaises conditions de travail doublées d’un salaire des ouvriers comparé à ceux des esclaves libérés : 250 000 leones soit 38 euros par mois pour 6 jours par semaine ; 4. la corruption des élites locales et 5. la pression et les harcèlements que subissent les propriétaires terriens et certains chefs de villages pour apposer leur signature sur un accord considéré comme usurier. Le Groupe Bolloré a fait son droit de réponse en avril 2012 en estimant qu’il poursuivait des objectifs de développement durable. Le Groupe estimait qu’il s’agissait d’une « malhonnêteté intellectuelle » de la part de l’Institut Oakland qui retrace le développement de l’usurpation des autochtones. La presse locale et internationale n’a pas manqué de rappeler que quelques jours après son investiture en 2007, l’ex-président français Nicolas Sarkozy a passé quelques jours de vacances dans le yacht du patron Vincent Bolloré.
Les spéculations sont allées bon train sur les liens des uns et des autres et l’exploitation des autochtones qui ne seraient pas rentrés dans l’histoire.
Sur le fond, l’association locale des petits propriétaires sierra léonais de Malen rappelle, comme au demeurant l’agence spécialisée des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation, la FAO, que les monocultures ne soutiennent pas le développement durable car elles génèrent des pertes de la biodiversité et détériorent l’équilibre environnemental et écologique.
Mais que faire face à des coalitions et des collusions de dirigeants africains avec des groupes multinationales qui refusent de prendre en considération le choix de populations autochtones qui choisissent librement de rejeter la monoculture sur la terre de leurs ancêtres ? C’est cette terre que le Gouvernement choisit de s’approprier unilatéralement du fait d’une absence d’enregistrement des propriétaires locaux, au sens occidental du terme.
Avec plus de 250 millions de dollars de bénéfice en 2011 pour le Groupe Bolloré au plan mondial (avant payement des royalties liées aux marques), et une estimation de 10 millions de $USD par an pour les 6500 ha en Sierra Leone, il faut comprendre qu’il est plus important de payer des dividendes aux actionnaires que de payer un salaire décent à un salarié, ex-villageois propriétaire des terres de ses ancêtres en Afrique ou ailleurs.
Le paradoxe est que c’est le Groupe Bolloré qui porte plainte contre les autochtones avec des chances de gagner compte tenu de la position d’un Gouvernement qui défend d’abord les intérêts étrangers avant ceux des populations locales.
Alors renégocier les contrats de concession ne sera pas chose facile à moins de faire appel aux « esprit des ancêtres » en relation directe avec le Dieu Créateur. YEA.
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