Questions sur l’actualité du 22 juin 2012
En silence, les autorités éthiopiennes s’activent pour assurer l’émergence économique ce de pays. Sur le fleuve Omo, au sud de l’Ethiopie, se déroule un travail gigantesque : le barrage le plus haut d’Afrique.
Les travailleurs sont déjà à plus de 50 % du chantier au fond d’une des gorges du fleuve Omo dans une des régions les plus reculées du sud de l’Ethiopie. L’achèvement est prévu en 2014 si tout va bien. Le mur de retenue s’élèvera à 243 mètres de hauteur avec une surface de retenue en amont de près de 210 km2. La capacité hydroélectrique, une énergie renouvelable donc, sera de 1 870 MW.
C’est donc ce chantier GIBE III qui permet de croire que les autorités politiques, non seulement veulent faire de l’Ethiopie, un pays émergent, mais ils savent que cela doit aller de pair avec l’amélioration du pouvoir d’achat de l’ensemble de la population. L’ambition est donc bien double avec la volonté de devenir un pays à revenu intermédiaire en 2025.
Comme tous les grands chantiers, de nombreuses populations (plus de 500 000 personnes) vivant en aval du barrage seront déplacés. Les autorités affirment néanmoins que les populations éthiopiennes ont été consultées.
Là pourtant, les choses ne se passent pas aussi bien. Les critiques des responsables de l’environnement du Kenya ne doivent pas être négligées. En effet, le lac Turkana qui se trouve au Kenya risque de ne plus exister, alimenté qu’il est à plus de 80 % par le fleuve Omo. Les nombreuses populations qui dépendaient aussi du fleuve risquent de se retrouver dans des situations de précarité. Ces points ont été anticipés dans les études de préinvestissement.
La solution passe par des inondations artificielles et contrôlées par l’homme. Cette régulation du débit du barrage va réguler le cours du fleuve Omo et modifier l’écosystème. En fait, c’est même un avantage.
En Ethiopie, la saison des pluies qui ne durait que 2 ou 3 mois suivie de 9-10 mois de saison sèche va « disparaître » grâce à ce barrage. Comment ? Avec un débit régulier d’eau c’est tous les douze mois de l’année que les populations pourront bénéficier de l’eau. Mirhet Debebe, le Président de la compagnie nationale de production d’électricité (EEPCo) a mis un point d’honneur à s’en assurer et rejette donc les critiques des « écologistes ». Cela ne devrait pas gêner les cultures locales, au contraire !
Mais les autorités éthiopiennes mettent une grande partie du pays en concession à des investisseurs étrangers. Les populations craignent que le barrage ne serve aussi, et peut-être principalement, à irriguer, d’énormes plantations de coton ou de canne à sucre, voraces en eau. Mais là encore, les autorités se veulent rassurantes et affirment qu’il s’agit purement et simplement de fournir de l’énergie hydro-électrique. La capacité d’électricité excédentaire sera d’ailleurs exportée vers les pays voisins, Djibouti, Kenya, Soudan et Somaliland avec des retombées en devises non négligeables pour l’Etat éthiopien. Rien ne garantit pour le moment une réduction des inégalités criardes dans l’accès à l’énergie pour les populations pauvres.
L’Ethiopie a choisi de n’associer aucun des bailleurs de fonds traditionnels qui viennent avec leurs conditionnalités usuelles réduisant l’indépendance économique des pays. C’est officiellement la compagnie nationale de production d’électricité EEPCo au nom de l’Etat qui va financer l’essentiel des 1,5 milliards d’Euros du projet. Le vrai partenaire est la Chine avec une banque, l’ICBC, qui financent les volets installations électriques avec 319 millions d’Euros. En réalité, c’est bien la Chine qui prête à l’Ethiopie. C’est un véritable partenariat stratégique qui va exclure la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, la Banque européenne d’investissement et bien des bilatéraux… La vraie victoire pour l’Ethiopie, c’est que le chantier va très vite. Une véritable révolution en Afrique ! YEA.
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