Questions sur l’actualité du 27 juin 2012
Le poulet bicyclette est un poulet en liberté, un vrai poulet fermier que l’on retrouve à l’état sauvage comme dans l’aviculture africaine. Le poulet bicyclette est donc un poulet qui n’est pas libre mais est en liberté…
Ce poulet qui se nourrit de rien de pollué en principe, circule assez rapidement, d’où le nom de poulet bicyclette, proche du poulet bio. Il arrive aussi que le fermier africain utilise le vélo ou la mobylette pour emporter plusieurs poulets attachés derrière son porte-bagage. On parle alors de « poulets mobylettes » ou de « poulets motocyclettes ».
Au-delà du côté humoristique, il faut savoir que le solde de l’Afrique subsaharienne est déficitaire pour ce qui est de la consommation individuelle de viandes. D’ici 2020, il faudra plus de 100 milliards de tonnes de viande pour les pays en développement. Il y a près de 10 ans, après le porc, la viande de volaille est la plus produite et la plus consommée dans le monde, avec 12 kg par habitant et par an en 2003. Le poulet représente plus de 85 % de la viande de volaille dans le monde et est en constante augmentation. Grâce à la rationalisation des modes de production, la réduction des coûts de production notamment la production en batterie ou hors-sol. Le paradoxe est qu’en plus de 30 ans, entre 1970 et 2003, la production mondiale de viande a été multipliée par 1,5 alors que celle du poulet par 4, mais l’exportation de viande de volaille par 13 essentiellement par les Etats-Unis (36 %), Le Brésil (31 %), l’Union européenne (15 %) et la Thaïlande (8 %).
En comparaison, la Russie représente 20 % des importations mondiales de volailles, 15 % pour le Proche-Orient, 12 % de l’Union européenne, 9 % pour le Japon, et 8 % la Chine. L’Afrique subsaharienne absorbe plus de 25 % des exportations de volailles de l’UE dont notamment les poulets congelés. Toute la problématique consiste à produire, assurer la souveraineté alimentaire, et exporter le poulet, certainement pas à bicyclette. Depuis l’instauration de la Politique agricole commune (PAC) de l’UE en 1992, les prix des céréales ont baissé en UE, avec comme conséquence, le coût de l’aliment de la volaille.
Si on y rajoute une productivité importante et d’importantes subventions à l’exportation (encore 25 %) sur le poulets congelés et les transports vers l’Afrique de l’Ouest notamment, il n’est pas surprenant de voir cette partie de l’Afrique se faire inonder par les poulets congelés de l’UE. Ce sont surtout des sociétés multinationales qui sont à la tête d’un système intégré –élevage, transformation-distribution- avec des délocalisations qui parfois ne produisent pas localement mais se contentent de vendre les résidus de découpes de poulet comme les ailes, les croupions, les cous et les carcasses. Alors on comprend mieux l’expression les « blancs aiment le blanc de volaille et les cuisses/avant-cuisses» et réservent ce qu’ils ne veulent pas à l’Afrique, de surcroit congelés. Il est donc impossible pour le fermier africain de vendre à un prix rémunérateur.
Les producteurs locaux subissent donc une concurrence déloyale. Le problème, c’est que ce sont les dirigeants africains qui octroient les licences et facilitent la distribution. Il arrive que les parentes proches de nombreux dirigeants africains soient à la tête de restaurants ou de buvettes où l’on vend justement les poulets charnus, parfois avec « hormone » provenant des congélateurs de l’UE. C’est l’essor de toute la chaîne avicole africaine qui est mis en péril. Mais est-ce que cette erreur stratégique est même perçue comme telle par les dirigeants ? Vraisemblablement pas ! Il n’est pas rare d’avoir des problèmes de rupture de la chaîne de froid (décongélation/re-congélation), favorisant des maladies comme les salmonelles et autres bactéries qui se retrouvent au niveau du consommateur africain… Ce dernier, à force de préférer le « moins cher » et opter pour « le plus gros morceau du poulet », finit par oublier aussi qu’il est responsable du déficit commercial et budgétaire lié à l’importation de volailles.
L’Afrique subsaharienne ne représente qu’entre 1,5 % et 3 % de la production mondiale. Depuis plus de 50 ans, les dirigeants et entrepreneurs africains ne se sont pas souciés de produire et de consommer local. Pour ce faire, il faut faire évoluer le poulailler traditionnel qui représente plus de 70 % de l’élevage avicole, souvent familiale, pour une aviculture semi-industrielle. Il faut au préalable résoudre le problème d’accès au crédit en zone rurale, l’approvisionnement énergétique, notamment l’énergie renouvelable, solaire de préférence. YEA.
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