Questions sur l’actualité du 11 Janvier 2012
Pour créer une monnaie commune, il faut absolument organiser la convergence monétaire. Sur ce plan, les économies des BRICS et de l’Afrique sont encore trop divergentes. Il n’est pas sûr que les mieux dotées seraient d’accord pour « systématiquement » éponger les dettes de ceux qui le sont moins surtout si ces dettes émanent d’erreurs d’arbitrages grossières voire de la corruption.
C’est donc bien une régulation flexible interne à cette zone qu’il convient d’inventer. Mais le vrai problème de fond est structurel. Tous les pays du BRICS commercent d’abord et principalement avec l’UE ou les Etats-Unis. Pour mémoire, en 2009, la Chine exportait pour 77,9 % de biens et importait pour 65,4 % des pays à revenus élevés.
Elle n’exportait que 17,7 % en dehors de sa région (Asie pacifique et est) et 6,6 % dans la région. La Chine n’importait que 17,1 % en dehors de sa région (Asie pacifique et est) et 9,1 % dans sa région.
Toujours en 2009, l’Afrique subsaharienne exportait pour 57,9 % de biens et importait pour 52,3 % des pays à revenus élevés. Elle n’exportait que 27,9 % en dehors de sa région (Afrique subsaharienne) et 13,7 % dans sa région. L’Afrique subsaharienne n’importait que 22,7 % en dehors de sa région (Afrique subsaharienne) et 11,8 % dans sa région.
Or, il n’y a aucune chance d’avoir une monnaie viable si l’essentiel des échanges et du commerce ne se fait pas entre les partenaires de la zone, soit au moins 50 %. Dire que les BRICS pourraient créer une monnaie « unique » ou en fait commune à terme relève d’une allégation non vérifiable par l’état des économies de la zone BRICS. Par contre, rien n’empêche la sophistication du système de compensation et de ré-investissement, ce qui aura l’avantage de créer un effet de levier que le système postcolonial occidental a systématiquement bloqué en neutralisant, directement ou avec des intermédiaires africains, le développement des capacités productives, l’innovation et la transformation des matières premières dans le cadre de développement de chaînes de valeur adaptées aux compétences disponibles.
L’essentiel des efforts entre pays du sud passe par une nouvelle forme de « solidarisme contractuel » qui fonde la création d’entreprises conjointes et une rupture avec la course vers le bas des salaires. Il s’agit d’innover et d’assurer le maximum de retour d’investissement en termes d’amélioration du pouvoir d’achat.
En réalité, c’est que l’Afrique subsaharienne n’a pas grand-chose à offrir en termes de produits manufacturiers. Une rupture stratégique devient incontournable pour permettre une focalisation sur le développement des capacités productives, l’emploi et le pouvoir d’achat en Afrique et plus largement dans les régions en développement y compris les BRICS.
En attendant, dans les faits, les pays qui commercent le plus avec les pays du BRICS risquent de se retrouver rapidement avec des réserves de change contenant un pourcentage de plus en plus élevé de renminbi ou de yuan. Il suffit avec le système de compensation d’autoriser la fonction de monnaie de compte, puis de monnaie de paiement et enfin de monnaie de réserve au plan national, puis régional, puis africain puis BRICS et enfin entre pays en développement pour que la monnaie chinoise devienne de facto la monnaie des prochaines transactions inter-pays en développement. Il sera difficile pour les pays à haut revenu avec un déficit budgétaire abyssal de s’y opposer. YEA.
Ecouter la “Question sur l’actualité du Jour” sur Africa N°1 dans l’émission “La Grande Matinale” d’Eugénie DIECKY du lundi au vendredi à 6h33, 7h33 et 8h33.
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