Questions sur l’actualité du 15 Mars 2012
Le Cameroun a choisi de soutenir l’arrivée des populations et entreprises chinoises au Cameroun. C’est tout à son avantage. Mais lorsque les terres vendues ou transmises aux entités chinoises ou aux agriculteurs chinois appartiennent à un Camerounais qui ne dispose parfois pas de titre foncier, c’est le choc.
L’Etat camerounais, pour des raisons qui lui sont propres choisit de défendre les textes écrits au mépris des droits coutumiers, ce qui fait que de nombreux agriculteurs camerounais de nombreux « expulsés » qui s’ignorent. A Akak un village agricole situé à l’est du Cameroun, Mr Joseph Fa’a Embolo, un père de famille de 59 ans avec neuf enfants, a refusé de céder une partie de sa propriété, des terres agricoles, à des agriculteurs chinois.
Il s’est retrouvé condamné par le Tribunal camerounais avec un an de prison ferme. Avec la prison ferme, ce Monsieur ira croupir dans les prisons camerounaises qu’il ne faut surtout pas décrire ici en termes d’insalubrité. Son absence devrait permettre à l’agriculteur chinois de prendre possession de la terre d’un Camerounais, privant ce dernier et toute sa famille des revenus tirés du sol.
Mais quel est ce gouvernement qui refuse de prendre en compte le droit coutumier ? Alors en allant dans les détails, il apparaît que les chefs traditionnels sont devenus tellement corrompus tout en étant des clientèles du pouvoir en place que même le droit coutumier se perd dans les méandres des arrangements de dessous la table. Il est question de 10 000 hectares de terres qui vont être consacrés à la production de riz chinois par des agriculteurs chinois.
Le problème est que ce cas n’est pas isolé. En l’absence de statistiques fiables et avec une presse politiquement correcte s’intéressant plus au sensationnel et considèrant les pauvres comme des entités négligeables, les campagnes africaines sont en train de changer de propriétaires. Là encore, c’est une des conséquences des démocraties usurpées qui favorisent l’émergence de lois allant en l’encontre des intérêts des populations sans défense.
Alors, lorsque chacun critique les institutions de Bretton-Woods pour forcer les gouvernements à mettre des conditions favorisant les investisseurs étrangers, il va falloir mettre un peu d’eau dans la critique.
En effet, personne n’a forcé le Gouvernement camerounais, ni les chefs traditionnels de vendre en catimini des terres ancestrales camerounaises à des Chinois… La corruption existe donc de plus en plus dans les zones rurales… Mais ce n’est pas dans la tradition africaine d’avant la colonisation à ce que je sache !
C’est en 2009 que le Gouvernement de Paul Biya a décidé unilatéralement d’accorder un traitement préférentiel à des étrangers dans le cadre d’une refonte de la redistribution des terres. Le paradoxe est que l’agriculteur chinois n’a pas de titre foncier, lui non-plus. Il a suffi que le chef de village oblige Mr Fa’a Embolo à céder sa terre parce que lui, le Chef de village, l’a transmis à des nouveaux propriétaires chinois. Alors, rien de démocratique dans tout ceci. Mais en réalité, c’est l’impunité assurée que lui octroie le fait d’être un membre influent, un notable comme on dit là-bas du parti présidentiel, pour prendre des décisions anti-démocratiques et privant d’avenir les enfants d’un membre du village. Autrement dit, ces chefs coutumiers corrompus ne sont pas différents de ceux qui ont vendu, en leur temps, les ancêtres africains qui ont été déportés et kidnappés en tant qu’esclaves dans le cadre du commerce esclavagiste, pompeusement appelé triangulaire.
C’est maintenant que l’agriculteur doit marquer sa nouvelle propriété afin d’obtenir un titre foncier auprès des agents du cadastre. Mais, si la corruption se retrouve à tous les niveaux, il est vraisemblable que le pauvre agriculteur camerounais ne gagnera pas son procès en appel.
Car ce n’est pas avec des ignames et du manioc qu’il pourra payer les frais exorbitants demandé par les avocats et la justice camerounaise. A force de vendre les terres ancestrales et de continuer à laisser des autocrates au niveau des villages décider unilatéralement de l’avenir de la cité, il n’est pas impossible que dans 10-15 ans, tout le village appartiendra à des Chinois. Alors la question se posera de savoir s’il faut accorder le droit de vote à des étrangers au Cameroun. YEA.
Ecouter la “Question sur l’actualité du Jour” sur Africa N°1 dans l’émission “La Grande Matinale” d’Eugénie DIECKY du lundi au vendredi à 6h33, 7h33 et 8h33.
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