Questions sur l’actualité du 22 septembre 2011
Les pays francophones d’Afrique de l’Ouest regroupés au sein de l’Union économique et monétaire Ouest-africain (UEMOA) ont décidé de lutter contre la corruption. Comment ? L’UEMOA met à disposition un numéro téléphonique vert pour permettre à tous citoyens et plus particulièrement les dirigeants d’entreprises, de lui communiquer les cas avérés de corruption. En fait, l’UEMOA fait appel : 1. soit au sens civique de chacun, 2. soit à la délation pure et simple. Il s’agit pour les entreprises lésées dans l’octroi d’un marché public de signaler aux Autorités régionales (UEMOA) les vices de formes, de procédures ou tous manquements constatés lors de l’attribution des marchés publics.
Certains ont loué cette initiative, d’autres l’ont décriée. En effet, un site Internet permettra la traçabilité et la publicité sur les procédures d’attributions de marchés publics. Mais une vraie question se pose : pourquoi est-ce que l’UEMOA ne s’adresse pas directement aux Etats qui sont souvent à l’origine des malversations ?
L’institution sous-régionale est déterminée à moderniser et rendre transparents les processus de passation des marchés publics. En réalité, chacun sait que dès lors que les Gouvernements de la zone ont le choix entre un marché gré à gré ou un appel d’offres, ils optent pour le gré à gré, c’est-à-dire qu’ils choisissent qui ils veulent. Comment alors aller vers une procédure 100 % transparente dans un marché de gré à gré ? Ce point ne semble pas avoir faire L’objet de beaucoup de détails lors du séminaire sur la « réforme des marchés publics et la lutte contre la corruption » qui s’est tenu à Lomé au Togo la semaine passée.
Mais une fois l’information remontée au niveau de l’UEMOA, est-ce que les procédures très diplomatiques de cette institution vont permettre de saisir les Etats concernés et corriger la situation ? Est-ce qu’il ne s’agit pas essentiellement de projets où l’Etat accepte la transparence sur les comptes publics parce que le budget provient des bailleurs de fonds extérieurs ? Le téléphone vert, n’est-ce pas en fait la mise en œuvre d’une recommandation des bailleurs de fonds occidentaux, las de voir une partie de leurs fonds disparaître dans des procédures locales sans qu’il n’y ait beaucoup de chances d’identifier les véritables coupables ?
Enfin, lorsque ce sont les dirigeants des pays occidentaux, leurs agences relais ou leurs experts qui sont à l’origine de la corruption, est-ce que le téléphone vert pourra contribuer à réduire les cas de corruption ? Rien n’est moins sûr ! Enfin, est-ce que toute dénonciation pourra se terminer par un procès devant un tribunal qui ne serait pas aux ordres des Etats membres de l’UEMOA ? Jugez en vous-même ! YEA.
Ecouter la “Question sur l’actualité du Jour” sur Africa N°1 dans l’émission “La Grande Matinale” d’Eugénie DIECKY du lundi au vendredi à 6h35 et 8h35.